Le jardin, c'est tout !

Jaune et blanc printemps

Par le plus grand des hasards, en cherchant tout autre chose, je suis tombée sur les photos d'Old Rectory, visité en 2010.

J'y avais adoré le potager, mais beaucoup aimé aussi la dernière partie du jardin. C'était un simple rectangle, clos de murs et de plessis, avec, au centre, du gazon et sur les longueurs, deux mixed-borders, l'un au soleil et l'autre presqu'à l'ombre.

Le choix chromatique était à la fois simple et audacieux: jaune et blanc, blanc pur, blanc éclatant, et jaune vif, acidulé et citronné.

S'y entremêlaient des euphorbes mousseuses, de jeunes feuillages fringants et dorés, des tulipes blanches et fières, des Iris et des ancolies beurre frais et des pivoines immaculées arborant à l'unisson leur toison d'étamines blondes.

Le jardinier avait du savoir-faire! Les mêmes couleurs avec les mêmes plantes se répétaient des deux côtés, à quelques nuances près bien sûr: côté ombre, des Hosta au lieu des Iris et des Paeonia emodi au lieu des pivoines en arbres.

Et au retour, quelques pots de narcisses doux jalonnaient le chemin en guise de souvenirs....

 

 

Il faut toujours avoir un saule au jardin!

Les saules blancs sont beaucoup trop grands et puissants pour la plupart de nos jardins. Pour le mien aussi. Pourtant, j'en ai deux derrière le potager, deux Salix alba var. vitellina.

Je les taille tous les hivers au ras du moignon qui se forme au sommet du tronc, soit en têtard. Un peu pour les garder petits, mais surtout parce qu'ils sont à eux deux, ma réserve personnelle et renouvelable de tuteurs.

A la saison suivante, ils émettent un balai de jeunes tiges blondes coupées à leur tour en fin d'année et conservées avec soin.

J'en fait des béquilles pour les digitales et les fèves. Je les dresse entre les pois de senteur ou mangetout. Je les tresse aussi en plessis qui protègent les bordures.

 

Parfois, je saute une année de taille pour récolter de plus grosses perches auxquelles s'accrochent les haricots et les cucurbitacées. J'ai même façonné une cabane pour mes petites-filles.

J'aime leur forme souple et irrégulière qui redresse les plantes sans raideur. Et leur écorce dorée, un brin lustrée, met de la vitalité au potager, surtout au printemps quand il est encore bien nu.

Mais attention! Les rameaux prennent racine à la vitesse de l'éclair. Il faut tous les arracher à l'automne pour éviter la naissance d'une saulaie! Mais je garde quelques années la cabane qui se couvre rapidement d'une couverture verte que j'ajuste à la cisaille en été.

Sisyrinchium striatum. Valeur sûre 2015/3

En voilà une qui a deux gros défauts.

Le premier et non des moindres, c'est son nom. Avec des « s » qu'on ne sait s'il faut doubler ou pas, avec des « i » et des « y » dont la position nous échappe, il a le culot de ressembler à celui d'un animal dont ignore s'il est mammifère ou canard. Il trouble les esprits et même les jardiniers peinent à imaginer qu'il s'agit une plante, pas moche de surcroit. L'adjectif qui l'accompagne complique la tâche. Si on comprend bien que « striatum » signifie strié, même après des années de culture on se demande encore pourquoi ! Pour de minuscules rayures brunâtres au revers des tout petits pétales que personne ne remarque jamais ! Mal nommée d'accord, mais frileuse en plus. Venue d'Amérique du Sud, dès que la température descend sous les – 10°C, elle tire langue, noircit des feuilles et meurt parfois, surtout si le sol est gorgé d'eau.

Mais avec beaucoup de concentration et un peu d'attention, ces deux difficultés sont contournées et on découvre une belle plante bourrée de qualité. Elle n'est snobe que pour l'orthographe et chochotte pour le froid seulement. Pour tout le reste, elle est sans problème. Elle pousse partout, même là où il fait sec et très chaud, frais et pluvieux, pourvu qu'elle ait du soleil. Et si le jardinier, accaparé par d'autres belles, l'oublie un peu, elle suit tout bonnement son chemin.

On commence à la remarquer en mai, quand ses feuilles arrangées en éventail glauque se dressent parmi les vivaces. Et déjà, on est content. Après les tulipes, enfin d'élégantes verticales qui réveillent nos massifs !

En juin, elle monte un peu plus haut encore, à 60 cm environ, avec de toutes petites fleurs, perchées par étage sur la hampe. Et leur couleur ! Quelle couleur ! Un jaune beurre d'hiver qui réconcilie tout le monde et s'accorde avec tout : pas trop soutenu pour ceux qui abhorrent le jaune, pas trop vif pour ceux qui détestent le flashy et pas trop blanc pour ceux qui craignent le virginal, parfait avec les bleus et mauves qu'il réveille, alors qu'il adoucit les oranges et les verts.

Le Sisyrinchium striatum se ressème de-ci de-là, juste comme il faut, là où il faut. Sa répétition naturelle donne du rythme et du corps aux plantes qu'elle accompagne.

 

 

Les boules jaunes

Je devrais me faire psychanalyser!
En photographiant les couleurs d'automne, incendiaires cette année, j'ai pris conscience de mon problème: j'ai un faible pour les boules jaunes. Perversité avérée, esprit de contradiction aggravé ou simple goût de l'aventure ? Je ne sais pas, mais je m'aperçois que là où les jardiniers sains d'esprit plantent surtout des houx et des pommiers à fruits rouges, moi, je les choisis toujours jaunes.

En haut: Ilex aquifolium 'Bacciflava', Malus 'Winter Gold'.
En bas: Malus 'Golden Hornet', Photinia davidiana 'Fructu Luteo, Malus toringoides.

il y a fort longtemps, 15 ans peut-être, à la lecture de je ne sais quel catalogue, j'ai appris qu'il existait un houx à fructification jaune, Ilex aquifolium 'Bacciflava'. Patatras, j'ai senti ma conscience s'ébrécher et l'attrait de la transgression s'emparer de mon âme ! Il me le fallait. Maintenant, il est là, entre jardin blanc et rue, pour dissimuler les bâtiments voisins. Et chaque automne, sa particularité me ravit!

Plutôt que de revenir à la raison, j'ai poursuivi sur la même pente. Je l'ai accompagné deux Malus, 'Golden Hornet' et 'Winter Gold'. Le premier est vigoureux et ses pommes brillantes jusqu'en décembre, tandis que le second, plus petit, est parfait pour les petits jardins.

Avec le temps, ma déviance s'est aiguisée, devenant plus exigeante et plus éclectique à la fois. J'ai placé le superbe Malus toringoides au centre du rond-point qui marque la transition entre la prairie et le sous-bois. Ce petit arbre, aussi large que haut, est une merveille de raffinement. Ses toutes petits pommes jaunissent dès septembre et en octobre, le feuillage s'y met aussi!.

Pour les initiés seuls, j'ai caché au bout du sous-bois, Le Photinia davidiana 'Fructu Luteo'. Ses petites drupes jaunes éclairent subtilement la pénombre et, de-ci de-là, malgré leur persistance, quelques feuilles rougissent en automne pour les mettre en valeur.

Je pourrais encore vous parler une fois de plus de l'Euonymus myrianthus qui me met en transe, des Malus tchonoskii et M. transitoria, qui me font rêver, mais je crains de vous transmettre ma folie...

Tagètes de mon coeur

Rien que le nom fait bondir plus d'un jardinier de ma génération, traumatisé par ces pompons courts sur patte aux allures de chrysanthèmes avortés, dont nos grands-mères abusaient. Elles dessinaient avec eux des motifs bigarrés et criards pour ceinturer les allées du jardin. Peut-être par un étrange transfert inconscient, cherchaient-elles à compenser la monotonie de leurs tenues toujours sombres.

Mes retrouvailles avec les Tagetes ont commencé au jardin Plume. J'y ai croisé des Tagetes tenuifolia dont les fleurs simples mouchetaient de jaune et d'orange de petits buissons mousseux et odorants. J'ai emprunté quelques graines et depuis le potager ne peut plus s'en passer.

Quelques années plus tard, j'ai osé les Tagetes 'Linnaeus', soi-disant issues du jardin de Linné à Upsala. Dubitative mais conquise, j'ai tout de suite aimé ses fleurs simples, plus grandes, rouge cuivré velouté, son feuillage dégingandé et son port élancé (60 cm).

'Frances Williams', plus haute encore (80 cm), jaune et brun, lui ressemble fort.

Plus récemment un ami m'a confié des graines de T. minuta aux fleurs effectivement minuscules, perchées sur un pied haut (1 m) et vigoureux au point d'être invasif. Mais les semis s'arrachent facilement et ses nuages jaune pâle adoucissent si bien les Dahlia qu'ils se sentiraient bien seuls sans elle!

Maintenant tout à fait réconciliée avec les Tagètes, j'essaye toutes celles que je croise, avec une nette préférence pour les genres botaniques et les fleurs simples.

La Tagetes lucida ou tagète luisante au feuillage bas, entier, vert satiné et au petites fleurs jaune vif, les Tagetes patula, un peu plus grandes, et beaucoup de variétés sans nom ramassées çà et là, comme celle de Brian Kabbes collectée au Mexique.

Tagetes dont les graines proviennent de chez B. Kabbes.

Ce sont des tropicales qui exigent chaleur, sol riche et arrosages réguliers. Tout ce que le potager seul peut leur offrir.

Je les place dans les rangs vides ou entre les tomates, les choux et les haricots. Leur couleurs chaudes et joyeuses pimente l'exubérance naturelle des légumes et il paraît que leurs exsudation s odorantes, mi-citronnelle mi-estragon, éloignent les indésirables.

Verbascum nigrum. Valeur sûre 2014/4

Le mot Verbascum sonne sec et dur. Pourtant, lui est associé un univers de molènes et bouillons aux larges feuilles douces, veloutés et alanguies.

La mienne, je devrais plutôt dire celle qui s'est invitée au jardin est dite noire: Verbascum nigrum ou molène noire. J'ai beau l'examiner sous toutes les coutures - fleurs jaunes, étamines violettes, feuilles et tiges vertes - je ne lui trouve rien de sombre. Le qualificatif inquiétant est peut-être là pour rappeler qu'elle n'a pas de limbes gris comme beaucoup d'autres membres de la famille. Les siens sont ordinaires et verts.

Elle est plus gracile aussi, moins imposante et son feuillage anodin. Mais ses hampes blondes dressées valent celles d'un bouillon blanc ou même d'une digitale. Répétées et régulières, elles scandent un massif d'Helenium ou d'achillées, et posent le brouillard des graminées.

Elles s'épanouissent fin juin - juillet et, dopées par un solide rabattage, repartent pour un tour en août. Avec une affection particulière pour les sols chauds et secs, elle se ressème de-ci de-là, sagement fidèle à elle-même.

Il en existe une version blanche acquise depuis peu: Verbacum nigrum 'Album' Campée dans l'implacable sécheresse du jardin blanc, j'attends qu'elle fasse ses preuves: semis à l'identique ? Vigueur ?

Dans le jardin de Camille, j'en ai vu des cohortes, douces sentinelles, veillant sur l'écarlate d'un rosier.

Deux mixed-borders jaunes

Début octobre, en Zélande, j'ai visité deux jardins proches mais très différents: het Vlackeland de M. Van Hasselt et celui de L. Dingeman.

Dans chacun de ces jardins, il y a un long mixed-border classique. Par classique, je veux dire disposé en long rectangle parallèle à la promenade, comme le faisait G. Jekyll. Tous deux s'apprécient donc en les longeant, la tête tournée à 45° environ. Et au fur et à mesure du cheminement, les touffes défilent et se superposent en partie aux voisines et à celles de du fond.

Tous deux misent sur les mêmes couleurs: du jaune surtout, relevé d'un peu de bleu ou de mauve. Et de chaque côté se retrouvent des Rudbeckia, Solidago, Alchemilla, ....

Pourtant le résultat est fort différent.

Chez L.D., toutes les plantes sont à leur place : chacune occupe un espace bien délimité, les petites devant et les grandes derrière. L'entretien est impeccable, Les fleurs fanées sont ôtées avec soin. Le rythme est soutenu par les répétitions, le contraste des silhouettes et des couleurs.

Chez M. V. les touffes se mélangent un peu. Quelques stolons ou semis audacieux se faufilent chez les voisines. Des tiges défleuries et sombres rayent l'éclat d'autres plus à l'arrière et des graminées mouvantes, floutent la précision des autres.

Je suis incapable de choisir, j 'adore les deux massifs. Ils prouvent qu'avec des matériaux presqu'identiques utilisés selon un même principe on peut créer des atmosphères très personnelles et bien différentes. Jamais un jardin ne ressemble parfaitement à un autre, chacun est le reflet de la personnalité du jardinier.

Visiter un jardin, c'est toujours partir à la rencontre d'une personne.

Une primevère prometteuse

Le printemps exagère. L'an dernier, il freinait des quatre fers à rendre fous les jardiniers impatients. Cette année c'est tout le contraire. Il cavale et accélère. Tout démarre en même temps: les pois, les carottes, les tulipes et les narcisses. Quelques pivoines s'apprêtent à fleurir et les premiers magnolias, essoufflés par tant de vitesse, laissent déjà leurs pétales tomber.

Sans conscience de l'urgence, sans même avoir terminé les préparatifs du printemps, j'ai abandonné le terrain pendant dix jours. Dix jours seulement et je le retrouve hirsute et échevelé, comme un adolescent trop vite grandi. Le travail est énorme, les bras m'en tombent .... J'essaye tant bien que mal de positiver, de voir le verre à moitié plein et d'apprécier les fleurs malgré la sauvagerie du décor.

Parmi les petits trésors de saison, il y a la bien nommée Primula veris, la vraie primevère, pas celle des collectionneurs ni des supermarchés, celle des fossés de mes vacances. Elle est presque inexistante dans ma région. Mais au gré de mes promenades françaises, j'en ai ramené des graines. Tout de suite elle s'est plu et s'est multipliée un peu partout. Je ne sais plus où ni quand j'en ai acheté une variante cuivrée, 'Sunset Shade', plus petite, avec laquelle elle se croise, déclinant couleurs et hauteurs, du jaune au bronze et de l'élancé au trapu.

C'est dans le jardin blanc que je la préfère. Elle éclaire les Pulmonaria 'Sissinghurst White', les hellébores blanches et le Chaenomeles 'Nivalis'. L'automne dernier j'ai planté des Narcissus 'Pipit' qui tardent un peu à fleurir. Il faudra que j'y ajoute des Heuchera 'Citronelle'. En rêvassant à cette idée, mes yeux sont brutalement tombés sur une incongruité, un détail étrange et détonnant, une couleur excentrique dans un jardin blanc pourtant plus très blanc:

une Primula veris magenta à coeur jaune, fière et altière, fraîche et innocente !!!

J'ai tout de suite appelé Olivier toujours étonné que je m'émeuve d'aussi peu et j'ai marqué l'emplacement avec quelques cailloux. Elle s'appellera 'Promesse', ou 'Surprise'. Non, ce sera plutôt 'Courage'.

Et d'un coup mon moral qui s'approchait des chaussettes est remonté au beau fixe. J'ai empoigné brouette et outils et suis parti recoiffer mon jardin trop pressé.

 

Actus:

L'association Areghat, à vocation historique, a créé un jardin botanique médiéval à Brain-sur-Allonnes (Maine-et-Loire). Plus de 800 plantes y sont rassemblées. Il s'agit de préserver les espèces cultivées alors, et de retrouver leur intérêt.

Des stands présentent les végétaux et expliquent les techniques utilisées en teinturerie, médecine, etc... Cet espace étonnant et instructif est ouvert régulièrement au public.

Quel Hamamelis ?

Samedi dernier, la société belge de dendrologie et l'IDS organisaient une journée d'étude consacrée aux Hamamelis à Kalmthout. La vie familiale marquant une pause inhabituelle, j'ai sauté sur l'occasion.

Lors des exposés de la matinée, j'étais assise derrière Sue Wynn-Jones de Crüg Farm et à côté de Diane Lane, épouse de Chris Lane, pépiniériste et conservateur de la collection Nationale anglaise d'Hamamelis. Imaginez mon émoi! Très intimidée par mon anglais approximatif et les connaissances de mon entourage, j'ai ouvert grand les oreilles et noirci près de 5 pages! L'après-midi , tout aussi intéressante, s'est passée sur le terrain et sous la drache(*).

Je ne vais pas m'étendre sur l'efficacité de la clef de détermination des Hamamelidaceae sur laquelle nous nous sommes exercés, ni sur la phyllogénétique du genre. Pour nous jardiniers, la difficulté est plutôt de se repérer parmi les 180 cultivars existants et de choisir le bon, celui qui convient à notre jardin et à nos attentes. Les spécialistes entendus ont été unanimes sur la sélection des meilleurs d'entre eux. Tout dépend du critère choisi, bien entendu.

	Le parfum: plus intense chez les jaunes			H. x i. 'Palllida'
	La fleur	- la luminosité	- claire	H. x i. 'Luna'
			- sombre	H. x i. 'Birgit'
			- bien visible à distance	H. x i. 'Sunburst'
		- la taille	- grande	H. x i. 'Harry'
		- la couleur	- jaune	H. x i. 'Primavera'
			- rouge	H. x i. 'Rubin'
			- orange	H. x i. 'Frédéric'
			- bicolore	H. x i. 'Strawberry and Cream'
		-la période	- précoce (12-01)	H . 'Rochester'
			- tardif (02-03)	H. x i. 'Westerstede'
			- longue (12-03)	H. 'Doerak'
	La forme	-les dimensions	- petit	H. x i. 'Double Gold'
			- grand	H. mollis
		- la silhouette: Elle s'élargit toujours avec l'âge	- dressée	H. x i. 'Harry'
			- évasée	H. x i. 'Robert'
			- arrondie	H. x i. 'Orange Peel'
			- pleureur	H. jap. 'Pendula'
	Le feuillage d'automne:			H. vernalis 'Sandra'

Bon choix!

(*) vocable belge irremplaçable désignant une pluie drue et insistante!

Le cercle jaune de Mien Ruys.

Le cercle: la forme parfaite, la géométrie limpide, tout en souplesse, sans arêtes, ni lignes raides. Le regard glisse sur sa rondeur, vire et revient sans jamais repérer le point de départ exact de sa promenade giratoire. Pas de début, ni de fin, un fragment d'éternité.

Dans tous les jardins, il y a des cercles. des cercles posés par distraction, sans même avoir conscience de leur forme: table, bassin, buis, ... Mais il y a aussi de cercles choisis qui bâtissent un jardin.

Pourtant, si parfaite soit-elle, la forme a ses faiblesses. A distance, le disque paraît s'aplatir en ellipse, ou de plus loin encore, se réduire à une fine ligne horizontale. Du même coup, disparaissent la profondeur et la générosité du galbe.

Mien Ruys, dans ses jardins de Moerheim, a essayé de ruser avec la réalité. Le cercle qu'elle a conçu est cerné de massifs jaunes. Je l'ai découvert brusquement au détour d'une haie. Et tout de suite, j'ai éprouvé un sentiment bizarre. Il y avait un petit détail qui clochait, quelque chose que mon œil ne percevait pas comme d'habitude.

Je me suis approchée et suis entrée dans la ronde. Mes pieds ont compris immédiatement. Le sol, légèrement creusé, y était concave! Oh, à peine, sans pente brusque, mais en douce déclivité. Puis j'ai reculé un peu. C'était bien cela. Mes yeux avaient été surpris par l'envergure inattendue du cercle. Evidée de l'intérieur, sa surface était artificiellement agrandie et l'effet d'ellipse atténué. Il gardait ainsi son ampleur et son dynamisme formel.

L'effet de surprise m'a fait sourire et le subterfuge m'a ravi!