Le jardin, c'est tout !

La corde à linge réhabilitée

Les cordes à linge sont en voie de disparition! Finis les habits blancs flottant au vent! Aurions-nous honte de notre réalité domestique, de nos vêtements et sous-vêtements pourtant propres ? Il y a longtemps que la cuisine s'est ouverte sur le séjour, mais la lessive n'a pas cette chance. Plus notre jeune siècle avance, plus on la cache! Le compost, lui, n'a plus rien de honteux, mais le linge qui sèche est dissimulé derrière un bosquet, pendu au garage, ou pire, tourne dans le sèche-linge !

Je ne comprends pas toujours notre époque, brutalement pudibonde quand il n'y a rien à cacher et considérant propre ce qui ne l'est pas vraiment! On rougit presque devant un slip blanc qui sèche dehors mais on l'adore quand, un peu moins net, il dépasse de la ceinture d'un jeans ! On préfère user électricité et énergie au lieu d'étendre nos chemises dehors!

J'ai donc décidé de réhabiliter la corde à linge, chez moi en tous cas. Au lieu de la cacher, je lui ai accordé le premier plan et au lieu de l'estomper dans le décor, je l'ai voulue belle et clinquante.

Imaginez un peu l'ovale de notre prairie, tondu ras, et cerné d'herbes hautes où s'installent de plus en plus de fleurs sauvages. Je trouvais l'espace agréable, mais sans éclat.

 

Autour d'un îlot cerné de chemins j'ai planté cinq piquets en châtaigniers, pas trop droits, pas trop raides et peints en rouge, un rouge net et franc, un rouge vivant. J'ai étudié les hauteurs, le plus proche étant le plus grand et le plus éloigné le plus petit, pour ébaucher une perspective accélérée.

Je les ai reliés d'un fil rouge et dans l'espace qu'ils cadrent, j'ai éparpillé parmi les herbes folles des plantes rouges aussi: Tulipa 'Couleur Cardinal' et primevères, Geum 'Mrs Bradshaw' et Lychnis chalcedonica, Crocosmia 'Lucifer' et Gladiolus 'Mirella'.

Et pour équilibrer les forces, j'ai installé à l'autre bout du pré, une table et deux chaises, rouges aussi.

Très étonnée par mon audace, je suis contente du résultat! Nos caleçons, soutiens-gorges, marcels et singlets s'y balancent souvent et fleurent bon le printemps. Mais je ne suis pas sûre que tous les visiteurs apprécient et mon entourage, circonspect, me suggère d'éviter le festival de Chaumont en 2015!

Des contremarches de charme

Je n'ai que deux marches au jardin entre la cuisine et le jardin blanc et elle sont moches! Je n'aime pas le dallage et encore moins les contremarches. Du temps où je n'avais pas le temps, pas l'œil et le portefeuille à sec, elles ont été bâties à la va vite en rondins de bois.

J'ai bien essayé de les noyer sous des Erigeron karvinskianus tant les escaliers d'Hestercombe m'avaient impressionnée. Mais cette pâquerette délicate a boudé mes marches grossières et ombragées.

J'ai pensé aussi à tout casser et tout recommencer, mais Olivier a blêmi devant l'ampleur des travaux et il a eu raison. J'ai alors feint de les ignorer, j'ai fait comme si elles n'existaient pas. Après tout, je n'allais pas me gâcher l'existence à cause d'un dallage et de deux contremarches!

Mais à Hodges Barn, j'ai frémi devant un petit escalier entre parking et jardin. des fraisiers des bois y promenaient en toutes innocence leurs petites fleurs blanches, discrètes et appétissantes.

A Lady Farm, mon coeur a bondi! Du lierre, tout vert et tout simple enveloppait les arêtes, arrondissait les angles et les aspérités transformant l'escalade en pente douce et dodue.

Fraisiers et lierre, quoi de plus simple ? Leur ténacité rustique convient tout à fait à l'ombre des mes marches si ordinaires et j'ai tout ce qu'il faut sous la main!

Testé pour vous:

J'ai pu choisir dans le catalogue de Manelli deux vêtements de travail. J'ai pris une veste à manches courtes et un short multipoches.
Ils sont très légers et très agréables à porter. La veste au-dessus d'un T-shirt, en été, n'est ni étouffante ni encombrante. Le short a exactement les mêmes avantages, sauf la ceinture que je trouve difficile à ajuster à mon tour de taille et sur laquelle se clipse ou s'enfilent difficilement les étuis à smartphone et à sécateur.

Le tempérament des aulx

Si je dis boules mauves, graphiques, d'1 m. de haut, qui structurent les massifs entre printemps et été, vous pensez tout de suite aux Allium hollandicum, et vous avez bien raison. Ils émouvaient toute l'Angleterre pile au moment où nous y étions: sur 11 jardins visités, pas un seul sans ail! Et jamais je n'ai éprouvé de lassitude. Ils étaient chaque fois affublés d'une personnalité différente par le voisinage.

Il y avait à Packwood des aulx cardinaux à la robe pourpre sombre. Majestueux, ils défilaient en long cortège bordé de bleus et surpris par le vent léger des Stipa.

A Cottesbrook, les aulx indécis se troublaient. Leurs contours d'habitude si nets s'estompaient derrière des nuages clairs et mouvants d'Orlaya grandiflora.

Ceux de Brockhampton s'affichaient plutôt modernes voire avant-gardistes. Leur caractère s'affirmait par la forme et frôlait l'abstraction. Dans un combat sans gagnants ni perdants, Ils opposaient leurs sphères aux flèches des Eremurus.

 

Mais ceux que j'ai préférés, jouaient au clair obscur. A Lady Farm, dans un sous-bois léger de bouleaux étincelants, ils jalonnaient des Hosta dorés et joufflus, et dégageaient une étonnante lumière.

Démonstration est faite qu'une plante n'est rien sans les autres et le doigté du jardinier!

Impasse printanière?

Cher Piet,

J'y vais tout net, j'ai un gros reproche à vous adresser. Que faites-vous du printemps?

Je devine vos soupirs et votre lassitude. On vous la pose souvent celle-là! Et surtout ne me répondez pas qu'il a été galvaudé à coup de tulipes incendiaires. Vous êtes hollandais. Vous avez des excuses. Les champs bigarrés vous ont donné la nausée. Mais il n'y a pas que les bulbes, vous le savez très bien. La preuve! J'ai surpris l'un de vos rares jardins printaniers, caché derrière les murs de Bury Court, comme si vous en aviez honte. Honte de quoi, je vous le demande? Vos pavots dansant avec les Cirses et les Sanguisorbes m'ont remué les tripes jusqu'aux larmes.

Mais j'ai vu d'autres de vos jardins au printemps. Pensthorpe et Scampston par exemple. Je les ai trouvés bien construits et prometteurs, mais sans printemps.

J'y ai cherché de la joie et de la verve, mais entre les touffes de feuilles larges et denses, je n'ai trouvé que du vert et de l'attente. La fête était prévue pour août et septembre et j'y étais trop tôt.

Pourtant, je ne cesse de célébrer votre génie qui a réveillé ces deux mois . Grâce à vous, ils ont cessé d'être la triste fin de l'été pour devenir le début joyeux de l'automne. Mais pourquoi faut-il tuer le printemps pour célébrer l'automne ? Je ne veux pas me passer du vert fringant des feuilles qui brisent leur bourgeon et des premières fleurs qui se dépêchent d'offrir un peu de nectar aux bourdons. Pourquoi se priver de l'entrée pour mériter le dessert? Au jardin je veux le menu complet, du plaisir pour chaque saison. Je suis certaine que votre talent peut y arriver!

Sans rancune j'espère.

Bien à vous,

Sophie.

Actus:

- L'an dernier, j'ai reçu de Bahco un merveilleux sécateur qui m'est vite devenu indispensable. Chaque matin, je le glisse dans la poche et me voilà au travail. Mais la poche souffre. Régulièrement, je dois ravauder et consolider le tissu.

Cette année, j'ai testé l'étui fixé à la ceinture. Je me sens plus légère sans ferrure qui cogne mes articulations et fini le raccommodage. Ma poche est ravie, moi aussi!

- Les 4, 5 et 6 juin prochain, c'est Jardins-jardin aux Tuileries.

A l'occasion, le jardin ambulant du Concours National de Reconnaissance des Végétaux parcourra les allées avec 40 végétaux. Les visiteurs pourront tenter d'en identifier au moins 3 et de gagner l'un des 3 lots.