Je suis triste et déçue.
Je vous avais préparé un billet et un reportage sur une perspective de génie créée dans les années '50 en Belgique par un paysagiste de renom. Comme il se doit, j'ai demandé l'autorisation des propriétaires. Ils ont refusé avec beaucoup de correction et de politesse. Et je dois bien entendu respecter leur avis. Mais une multitude de questions me viennent à l'esprit. Peut-être ai-je besoin de donner un sens à ce refus....
Pourquoi les propriétaires belges sont-ils si frileux à l'idée de dévoiler leur jardin sur le net ou ailleurs ? En Angleterre, c'est une fierté, en France, cela le devient, mais chez nous, c'est encore très difficile.
Au Royaume-Uni, chacun, du Prince de Galles à l'ouvrier de banlieue, du duc de Marlborough au simple gentleman rêve d'ouvrir et de montrer son jardin, ne fût-ce que quelques heures par an . Un foultitude d'organismes répercutent l'événement et sont relayés sur le net: la RHS, la NGS, etc... . Le Good Gardens Guide ose même attribuer des étoiles sur le modèle des macarons du Michelin.
En France, la mise en route est récente, mais la démarche est parfaitement au point et admise aujourd'hui. Après le guide de Michel Racine sous forme livresque, le Comité des Parcs et Jardins fait un travail admirable depuis 2003.
En Belgique, la démarche fut précoce avec les "Jardins Ouverts" créés par J. de Belder en 1994. L'initiative est superbe, je lui dois beaucoup. Mais peu de renseignements sont disponibles sans abonnement et l'inventaire, sur base volontaire, n'a rien de systématique. A une échelle plus locale, "Jardins en Pays de Liège" ou les "Jardins en fête" de Bruxelles ont beaucoup de mérite aussi. Mis à part ces tentatives associatives, c'est le désert. Aucun recensement national et public, disponible pour tous, n'existe.
La division d'un si petit pays l'affaiblit sur ce point comme dans d'autres, c'est clair.
Nos beaux jardins sont souvent petits. Beaucoup de propriétaires se sentent mis à nu si ce morceau de leur vie intime est dévoilé. C'est vrai aussi.
Mais plus profondément, il y a chez nous une horreur de la mise en avant personnelle, une peur viscérale de se prendre la tête, que certains appellent le complexe d'Hercule Poirot. Pour vivre heureux, vivons cachés et surtout cultivons l'auto-dérision qui vaut bien mieux que l'auto-promotion, presque vulgaire. Si dans beaucoup de circonstances je partage intimement ce état d'esprit, pour le coup c'est trop.
A quoi sert la beauté si elle est frileusement gardée et regardée par 2 ou 3 personnes. C'est déjà mieux que cachée dans les caves d'un musée, abimée ou perdue, bien entendu. Mais le partage de quelques poussières de beauté avec des curieux qui le souhaitent ou d'autres qui ignorent son existence ne peut que faire avancer le monde.
Qui prendra l'initiative d'un tel travail ? N'en demandons pas trop aux pouvoirs publics qui n'ont plus un sou. Existe-t-il une association de paysagistes, des journalistes, un bibliothèque comme celle de R. Pechère ou des quidam courageux qui peuvent prendre en charge cette entreprise ?
Mais où ai-je la tête ? Ce jardin, reliquat extrêmement bien conservé du paysagisme des années '50, fait partie de l'héritage que cette époque nous a laissé. J'ai eu l'outrecuidance d'espérer le montrer sur mon petit blog et mon petit site perso. Mais il mérite bien plus que cela!
NB:
L'hiver a du m'entendre. il revient en force. Si je suis contente de le voir enfin et me réjouis du printemps que j'aurai la joie d'attendre, j'ai peur pour les fleur qui le croyaient déjà parti!
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