Etrange et inquiétant, le noir est pourtant une très belle couleur au jardin.
En avril, j'avais lu, dans le bel ouvrage qui lui est consacré, qu'E. Tymen adorait le noir "ciel d'orage". Et coïncidence, fin mai nous visitions un jardin au Sud du pays de Galles, celui d'Anne Wareham à Veddw, où le noir était presque roi. Et je dois dire que j'ai beaucoup apprécié.
Exactement comme le ferait un ciel d'orage qui rehausse la couleur des arbres bruissants, les verts surtout mais les autres couleurs aussi, sont avivés sur fond de gris plombé. De surcroit, le noir sculpte. Il souligne les formes et crée une profondeur qui accentue le relief.
Imaginez un instant cet escalier soutenu par des traverses naturelles et grisées par le temps. Il devient tristement anecdotique.
Et cette barrière, remplacez-la deux secondes par des piquets de châtaigner: la césure est moins marquée, la prairie rejoint plus vite le jardin. Alors que noire, elle arrête le regard qui s'y pose un instant puis rebondit sur le vert vif du pré. La profondeur est accentuée, ces lieux anodins deviennent attrayants.
Heureusement, il ne s'agit pas d'un noir encre de Chine ou aile de corbeau, dur et brillant. Adouci de gris ou de bleu, il devient anthracite ou ardoise. A Veddw, la plupart des matériaux solides sont de cette couleur: les bancs, la barrière, les escaliers, la pergola et même les pots de fleurs. Jamais je n'ai trouvé le décor lourd et écrasant. Il est traité avec tant de retenue et entouré de tant de verdure qu'il a fallu que j'atteigne la fin de la promenade pour m'apercevoir de l'omniprésence du noir.
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