Dans un jardin, le mien ou celui des autres, il y a parfois de minuscules détails qui déclenchent de grands émois. Alors que pliée en deux je tordais le collet à quelques renoncules un peu trop téméraires, je ne sais pourquoi, l'un d'entre eux m'est revenu en tête.
C'était au printemps dernier, à Woodchippings, dans le Northamptonshire. Il faisait très beau et très chaud. C'était un tout petit jardin de 12 ares que se partageait un couple: à droite les fleurs de Madame, à gauche, les plantes de Monsieur. Chaque partie, dans des styles différents, débordait de générosité et de passion. Monsieur préférait les tapissantes, la mi-ombre et les Epimedium, tandis que Madame s'éclatait avec les couleurs, la lumière et les volumes.
Entre les deux, une petite pelouse de quelques mètres carrés faisait office de terrain neutre. Et au centre du mouchoir de poche, trônait une étrange cloche de bois tressé. Nous nous sommes approchés, pensant trouver une grenouille, une tortue ou un lapin en pension temporaire. Mais, à part quelques trèfles ébouriffés, nos yeux écarquillés à 1,7m de haut ne voyaient rien. Il a fallu nous accroupir, puis nous agenouiller pour distinguer enfin le mystère.
L'arche d'osier protégeait un Ophrys fucifera ou Ophrys bourdon en pleine floraison. Bouche ouverte et lèvre pendante, l'orchidée mimait avec conviction la femelle bourdon. Elle attendait le mâle qui croyant à une belle aubaine, allait se poser là et tenter de s'accoupler. Il se couvrirait alors de pollen et le déposerait plus loin dans la bouche d'une autre orchidée.
Nous sommes restés là un bon moment à admirer une si petite chose capable de si grands stratagèmes.
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